Ce phénomène concerne des jeunes filles, appelées michetonneuses, qui entretiennent des rapports romantico-sexuels avec des hommes uniquement dans le but d’obtenir des faveurs financières et matérielles.
Quelle est la relation entre la michetonneuse et le client ?
Concrètement, la « michetonneuse », entretient une relation amoureuse avec lui, avec promesse de relations sexuelles pour obtenir en échange des consommations, des vêtements, des sacs, des téléphones, des sorties, etc. Parfois, certaines s’enfuient avant de devoir donner quelque chose en retour, mais d’autres se livrent à des relations sexuelles multiples.
Qui sont les michetonneuses ?
Si la prostitution touche toutes les catégories sociales, les « michetonneuses » sont généralement des adolescentes issues de quartiers modestes.
Elles disposent d’un niveau de vie décent, mais souhaiteraient accéder à un pouvoir d’achat leur permettant d’obtenir tous les attributs matériels valorisants qui leur permettrait d’accéder à un meilleur statut social. Ces jeunes se sentent souvent exclues de la société, des citoyens « de seconde zone », et rêvent de mener une vie de jet set qu’elles ont l’habitude de voir sur les réseaux sociaux ou dans la télé-réalité. Pour ces jeunes filles, réussir sa vie passe par le succès matériel et financier. D’ailleurs dans l’imaginaire des jeunes concernés par ce phénomène, les « michetonneuses » peuvent avoir un statut enviable, renvoyer une image de réussite sociale.
Ce phénomène est couramment appelé « l’effet Zahia », en référence à la jeune prostituée qui avait été « offerte » à plusieurs joueurs de foot et est ainsi parvenue à la célébrité. Les jeunes filles ont également le même point commun : une première expérience sexuelle ratée. De cette expérience nait une quête d’amour, mais aussi un rejet des hommes qui se traduit par un désir de revanche : elles pensent pouvoir profiter des hommes et de leur argent. C’est ainsi que commence le michetonnage.
Comment rentre-on dans le michetonnage ?
La particularité de cette forme de prostitution est que ce sont les jeunes filles qui vont elles-mêmes à la rencontre des hommes. Néanmoins, il y a un fort effet d’entraînement de la part de leurs amies qui michetonnent déjà et qui leur donnent des conseils.
Les jeunes filles voient les biens matériels accumulés par leurs amies, et sont tentées : de l’extérieur, le processus semble simple, facile. Au départ, les michetonneuses cherchent à avoir un ascendant sur l’homme et pensent être en position dominante. Toutefois, tôt ou tard, le véritable rapport de force se révèle au détriment de la « michetonneuse » qui est contrainte de devoir effectuer des pratiques qu’elles n’avaient pas forcément envisagées initialement.
Finalement, est-ce que ce ne sont pas les hommes qui se font duper ?
Les « michetonneuses » ont l’impression de duper des « pigeons », d’occuper une position dominante. Or, elles se retrouvent souvent dans un engrenage, contraintes et violentées.
La relation entre les deux protagonistes est inscrite dans un rapport de domination extrêmement puissant.
Il y a quatre types de domination principales, et elles peuvent se cumuler ou non selon les situations.
la domination masculine : qui se manifeste symboliquement par le fait que les « cadeaux » de l’homme sont des bienfaits d’ordre matériel, alors que c’est la femme qui fournit des « bienfaits » sexuels. Quelques garçons se livrent à cette pratique, mais restent en minorité.
La domination liée à la différence d’âge : qui se manifeste par l’expérience de l’un et l’inexpérience de l’autre, et la possibilité de tirer profit de la naïveté relative des jeunes filles. Il y a, en outre, la possibilité de réaliser des fantasmes de pygmalion et d’éduquer une mineure à ce que serait la sexualité. la domination sociale : qui est liée au fait que l’homme a des ressources et que la jeune fille n’en a pas ou peu. la domination ethnique : qui est liée au fait que l’homme pourra compter sur la vulnérabilité de jeunes filles issues de migrations, dont la conduite sexuelle est fortement stigmatisée par leur culture d’origine et qui ne bénéficiera que de peu de soutien de sa famille en cas de conflit.
Sans argent, est-ce vraiment de la prostitution ?
Les jeunes filles n’associent pas leur acte avec de la prostitution, décrivant des hommes qu’elles fréquentent comme des « pigeons » qui se laissent avoir. Pourtant, le michetonnage est une forme informelle de prostitution puisque les jeunes filles sont bien payées en échange de faveur sexuelle : simplement, ce n’est pas de l’argent, mais des produits de marques, des soirées dans des restaurants, et autres faveurs. Quant aux filles qui arrivent à se sortir de la situation avant l’acte sexuel, on parle de pré-prostitution : ce sont des conduites à risques qui s’inscrivent dans la marchandisation du corps.
Le michetonnage est donc un sujet à prendre avec beaucoup de sérieux : les jeunes filles, déjà vulnérables de par leur âge et catégorie sociale, s’exposent à de nombreux risques. Par ailleurs, les éducateurs spécialisés constatent que le plus grand nombre des jeunes filles qui s’engagent dans ce genre de conduites s’en repentent et l’abandonnent très vite, percevant les dangers qu’elles encourent. Malheureusement, toutes n’ont pas les ressources ou suffisamment d’estime d’elles-mêmes pour gérer et se protéger de ces relations complexes et dangereuses : elles s’exposent au risque de basculer dans des formes de prostitution plus classiques.
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